Une témérité à revoir [PV]

C'est marrant de voir comment de simples paysans ou même citadins craignent ce qu'ils ne connaissent, du moins directement. Écumer les bars pour trouver quelqu'un capable de m'emmener à l'île de Walhalla avait été beaucoup plus dur que je n'aurais jamais pu l'imagnier. Rien qu'évoquer ce nom dans certains endroits semblait provoquer crise cardiaque et panique totale. Or à ce que l'on m'avait raconté, peu de personne en était déjà revenu vivant, et ceux qui avaient réussi à le faire n'avait jamais osé en parler. Preuve est que l'aventure est un tant soit peu traumatisante, du moins pour les faibles d'esprits qui en entendent parler. Je ne me permettrais pas de remettre en cause la véracité des faits autour de ce sujet épineux, mais j'ai toujours voulu y aller, déchiré entre une curiosité maladive mais simple et une soif d'entraînement et donc de puissance. Je crois que c'est cette fois mon côté un peu fou, celui à qui il manque une pincée d'aventure pleine d'adrénaline et de sang, qui me poussa à me risquer en ces terres hostiles. Du reste, et comme je le disais, trouver un équipage pouvant m'y déposer relevait du conte de fées, et c'est malheureusement en empruntant un bateau de forte belle allure que je pus me diriger vers ce mystique endroit. Il n'était bien sûr pas question d'user de mon épave, qui me servirait éventuellement pour repartir. Si tant est que je survive à ce "Roadtrip".

Car la principal était pour moi d'être toujours être franc avec soi-même. Ma témérité et ma quête de reconnaissance ne troublait en rien mon esprit, et tout était clair pour moi. Les chances que je résiste plus d'une journée, car je suis optimiste, sur cette île, étaient des plus minces. De toute façon, un combat et puis s'en va. Car il faut que je trouve un unique adversaire, que je le tue, et que je réussisse à me tirer sans alerter ses copains ou tous les autres monstres cachés dans la forêt avoisinant. Un programme bien sympa au fond, tout de même gâcher par la présence constante de ce léger crachat m'entourant. Il n'y avait rien à faire, le pluie fine ne cessait de tomber sans discontinu. Mes habits, protégés par une espèce de sac poubelle que l'on appelle parka, devenaient progressivement collant car humide, et donc très désagréable à porter. Le froid qui régnait un peu partout me faisait frissonner, tandis que la différence de température air-eau créait un brouillard levant, recouvrant tout d'un bon mètre d'épaisseur. En clair on voyait partout sauf en bas, et c'est peu dire car le pont se laissait aussi envahir par cette brume inquiétante.

Je ne savais pas trop quoi faire de mon vaisseau qui possédait, point non négligeable, une belle barque en bois. Soit j'accostais avec, et je prenais le risque à mon retour qu'il soit détruit entièrement, soit je partais avec la barque et je prenais le risque de ne pas pouvoir ramer pour revenir. Faire le malin en jetant l'ancre à quelques mètres des terres étaient du genre à déconseiller, et c'est bien pour ça que je le ferais. J'userais de mes ailes pour parcourir les dix mètres qui demeureront entre mon bateau et la terre. D'ailleurs, je le mettrais en position avantageuse, donc prêt à partir si jamais problème attachant il y avait.
J'appliquais donc ce que je pensais, et ne retint mon emprunt que par l'ancre qu'il possédait. J'espérais tout de même ne pas perdre de temps à la remonter. C'est pour ça que j'aurais voulu un équipage. Moi je vais m'éclater, dans les deux sens du termes, pendant qu'eux veillent sur le bateau, et accessoirement sur leur peau. Et si je reviens précipitamment, ils sont là et on se barre ensemble et sans problème. Finalement j'aurais du insister.

Enfin, une fois que tout fut terminé, je sortais mon épée, et parcourut les dix gros mètres me séparant des terres. Ce que je n'avais pas remarqué de même, c'est que le brouillard avait amplement diminué à l'approche de cette endroit. Tant mieux, ou pas. Posant pieds à terre, je m'attelais à allumer une torche et pénétra dans la forêt, arme toujours en main. Le plus inquiétant était partagé entre l'ambiance glauque du bois et le calme affreux qui y régnait. Un peu de bruit, même intimidant, est toujours utile pour repérer d'où l'on va nous attaquer. Un silence total offre à des possibilités monstres quant à une attaque surprise, finissant généralement par la mort des proies. Jouant de la même manière que la nature, je marchais silencieusement, veillant à ne rien faire craquer. Le mixe entre l'Académie et mes précepteurs vagabonds m'étaient bien utiles pour ces mouvements furtifs. Je débouchais alors sur une petite clairière, que le soleil peinant à éclairer. Il n'y avait rien ni personne, si ce n'est deux ou trois cailloux et un arbre faisant la gueule. A moins qu'il soit fait comme ça, qui sait. Pas moi en tout cas. Continuant ma route avec prudence, je me stoppais brutalement au milieu de cette endroit. Car un bruit venait d'attirer mon attention: il se baladait, tournait tout autour de ma position sans que je n'en vois son origine. Serrant au mieux mon épée, je me concentrais plus grandement sur ces sonorités diverses, allant du craquement de branches au mouvement de feuilles. Et puis plus rien, le silence reprit son droit. Du moins pas pour longtemps selon moi, car c'est le moment où le chasseur a trouvé un moyen de débusquer sa proie avec une efficacité monstre. Mais je ne suis pas une proie ordinaire...

Une sorte de cri de guerre s'élève de derrière moi. Je vais volte face rapidement et vois un homme, tenant en ses mains une hache gigantesque, sauter à travers le feuillage et me courir dessus. Épée positionnée pointe vers l'avant, j'imite la personne et pars à sa rencontre à mon tour. On se stoppe à quelques mètres l'un de l'autre. Je l'entends alors psalmodier une sorte d'incantation, l'entourant d'un dégagement de puissance transparent. Me regardant dans les yeux, il pose violemment sa hache par terre, sort un long couteau de son dos et commence à se scarifier. Il se coupe partout où il peut, créant de plus ou moins grosses entailles sur son enveloppe corporelle. Le liquide rougeâtre qui nous caractérise si bien coule abondamment des tranchées qu'il se dessine partout sur le corps. Il ne m'a pas lâché du regard un instant, et n'a pas beaucoup grimace, par rapport aux blessures qu'il se fait à lui même. J'ai l'impression que l'ensemble de ce rite lui sert à accroître spontanément sa force physique. Ses muscles se développent, prennent du volume. D'un homme normal, il passe à une montagne vivante de muscles. Pas bon pour moi ça...

Je n'ai rien le temps de voir, et en ai à peine pour me jeter sur le côté. Un nuage de poussière est soulevé avant de rapidement retomber au sol. En un clin d'oeil, il a eu le temps de se saisir de son hache, de la lever derrière lui et de l'abattre sur moi. Je réagissais une seconde plus tard, j'étais un homme mort. Je pose ma main par terre et m'en sers pour me relever. Son arme est plantée dans le sol, je dois en profiter rapidement. Je me jette sur lui, prêt à lui ouvrir un peu plus les veines, mais il est trop tard. Il pivote sur une jambe, pousse un second cri de guerre, et tourne sur lui même en tenant son jouet. Je me tourne un instant et vois le manche de l'objet me percuter de plein fouet. La force appliquée dans ce coup est terrible, et je suis projeté des mètres en arrière, finissant ma course par quelques roulades peu agréables. Je me ressaisis, et pose mes deux pieds en appui pour arrêter ce désagréable mouvement. Ne me laissant pas faire, je repars vers lui, pour en finir une bonne fois pour toute.

Un premier coup manque de me couper en deux sur la largeur, tandis qu'un second m'aurait fendu le crâne si je ne m'étais pas baissé à temps. Je dois profiter du temps qu'il met pour faire revenir son arme, car il se trouve alors en danger durant ce laps de temps. La hache revient, je saute et glisse jusqu'à ses pieds. Arrivée à cette partie du corps, je m'en sers pour me redresser et être juste devant lui. Impassible, je lui lance un dernier regard. Faisant passer mon épée au dessus de moi, et la tournant quelque peu, je lui tranche la tête. Elle vole un peu plus loin, tandis que son corps chute d'un bloc en arrière. L'ensemble tombe d'un un fracas impressionnant, risquant d'alerter la compagnie aux alentours. Mieux vaut ne pas rester là, d'autant plus que l'obscurité gagne du terrain. Essuyant mon épée du sang de cet homme, je la range dans mon fourreau et prends la fuite à travers les bois, alors que d'autres hurlements s'élèvent de derrière moi. Mon séjour ici n'est pas encore terminé...

J'avais bien du courir pendant deux bonnes dizaines de minutes, sans jamais m'arrêter ni me retourner. Tant que du bruit vindicatif s'élevait de derrière moi, il était hors de question que je me stoppe. Affronter en combat singulier tous mes poursuivants étaient quelques chose de faisable, mais je ne souhaitais pas perdre mon temps à les isoler un par un. La manœuvre aurait été bien compliquée et le résultat n'aurait probablement pas été à la hauteur de mes prévisions. Et puis, alors que mes muscles m'indiquaient la fin de la course et que mes poumons me hurlaient de mettre fin à tout ça, plus un bruit ne me parvint aux oreilles. Il n'y avait plus rien, le calme plat étant revenu prendre sa place. Je pouvais voir ça sur n'importe quel angle, il ne ressortait du lot que trois simples explications. D'une, mes poursuivants en avaient eu marre et étaient retournés chez eux. Deux, je n'avais jamais été le proie, et ils étaient après quelque chose de plus important. Trois, ils étaient tous morts de la main d'une bête. La troisième solution était la meilleur à imaginer, mais annonçait aussi le pire: il se pouvait alors fortement que la chose soit derrière moi, à l'affut, et mieux rodée aux techniques de chasse que mon précédent vis à vis.

Quoiqu'il en soit, je décidais de m'accorder une pause de cinq grosses minutes, afin de reprendre haleine et de réfléchir calmement à la suite des évènements. Le lieu, déjà peu accueillant d'origine, était devenu très hostile à ma présence. La nuit se faisait de plus en plus présente, et je n'avais que deux torches, dont une entamée, pour tenir jusqu'au levé du jour. De plus, je ne sais absolument pas ce qui rodent en cette forêt ainsi que la position de mon bateau. Il est étonnant de voir comment on peut se perdre en un rien de temps si on n'est pas du coin. Remarque, j'en connais peu qui sont du coin, du moins encore en vie. Même ces hommes, probablement des Valkors, n'avaient pas assez de courage pour s'éterniser ici. Il se pouvait même qu'ils soient contraints à demeurer en ces terres, sans la moindre aide venant du monde extérieur. Me repassant sans cesse mes options, je décidais de rester en forêt le temps de la nuit, puis de regagner la direction de mon navire dès demain. A ce moment là, je réfléchirais mieux à la suite.

Sur ce, il est temps de se remettre en mouvement, on ne sait jamais. Malgré moi, je dus me saisir d'une de mes torches et de l'allumer, afin de pouvoir me guider à travers l'obscurité naissante. Je pense d'ailleurs m'éloigner du bord, car les clairières se font de plus en plus nombreuses au fur et à mesure de ma progression. J'aperçois alors une colline, qui m'offrirait un fort beau point de vue sur le reste de l'île, si tant est que le brouillard ne cache pas les terrains verts sur lesquelles je vogue actuellement. Trouvant un chemin raide et escarpé, je commence à grimper pour joindre le sommet en un rien de temps. La nuit est de plus en plus présente, ce que je n'avais pas pris en compte pour mon observatoire. Je patienterais donc ici, ayant un champ dégagé pour prévenir toute attaque. Scrutant les alentours, je vois une forme se dessiner sur le bord de la colline. Gardant mon flambeau allumé, je hèle l'ombre pour essayer d'en tirer une identité. Je ne risque rien car ma position est trahie depuis un bon moment maintenant. Je n'obtiens cependant aucune réponse, alors que je vois l'ombre bougé. Touchant l'herbe, je mesure l'humidité et devines que laisser la torche au sol ne ferait pas flamber la végétation. L'ombre s'approche alors de moi, alors que je dégaine mon arme. Un combat avec pour seule lumière celle de la Lune. Pourquoi pas?

Seul le bruit du vent déplacé dans l'herbe accompagne nous mouvements. Moi et l'inconnu sommes lancés dans un ballet nocturne et acharné. Enivré par le combat, c'est à peine si nous prenons le temps de respirer. Pourtant, nous en aurions bien besoin, vu le nombre de mouvements que l'on exécute. Mes muscles travaillent à fond, sont poussés dans leur dernier retranchement. Mon coeur pompent autant de sang, durement oxygéné, que possible, et l'envoie partout à travers mon corps. Mes poumons se remplissent très mal, et leur contraction inutile me donne des débuts d'essoufflements. J'ai toujours du mal à voir qui ose m'affronter, mais je sais qu'il est humain. Au moins d'apparence. Sa carrure n'est pas surdimensionnée, il n'est pas immense ni tout petit. Le bruit que font le tissu de ces vêtements en se frottant rappelle une mélodie que j'ai entendu il y a fort longtemps. Je crois que son visage est masqué par un artefact quelconque, car il respire comme s'il était étouffé.

Nous sommes l'un devant l'autre, c'est donc le moment d'agir. Prenant mon épée à deux mains, je saute en avant et tente de lui ouvrir le crâne. Il esquive agilement par une roulade sur le côté. Je tente de le suivre des yeux, ma sa vitesse mêlée à l'obscurité m'en empêchent. Il joue à son tour, se mouvant tel un serpent pour m'approcher suffisamment. Même action que la mienne, mais arme nettement différente. A la voir me frôler, et à la tonalité qui s'en dégage au contact du sol, je la classe dans la catégorie lourde, du genre masse ou marteau. Je tombe juste, du moins à ce que je vois de sa seconde attaque. Car à l'aide d'une force que je ne lui aurais pas soupçonné, il enlève sa massue profondément ancré dans le sol avec une facilité déconcertante et reviens à l'assaut. Tandis que je recule rapidement, il fait plusieurs mouvements trompeurs, essayant de m'induire en erreur pour son coup. Il se décide finalement à répéter une nouvelle fois son mouvement. Je stoppe ma fuite, me campe sur[b] ma position, pose le plat de ma main libre sur la pointe plate de ma lame, et mets l'ensemble en opposition. Le coup est rude, et je dois fléchir mes genoux pour ne pas qu'il se brise.

Il insiste à l'aide d'une pression monstrueuse, ce qui me fait penser que je ne saurais me défaire de lui aussi aisément que les autres. Du moins en ce moment, car je suis en très mauvaise posture. Une stratégie efficace mais peu sûre émerge dans mon esprit. Contrant le système de compensation des forces, je fais un pas en avant. L'homme part en avant, surpris et surtout entraîné par sa propre puissance. En même temps, j'agis rapidement, passe sur son côté à me retrouve dans son dos. Une tentative rapide et couronnée de succès, car j'ai maintenant mon fer enfoncé dans son épaule droite, celle tenant la masse. Je pense à tort le tenir en respect. Faisant fi de la douleur que doit lui causer la blessure, avec mon épée toujours enfoncée dans son dos, il bouge uniquement son bras gauche, dont le poing fermé vient heurter ma tête, m'ouvrant la tempe par la même occasion. Je suis projeté au loin, et nous sommes dorénavant ex aequo.

Les coups suivants ne seront qu'une question de timing pour les esquives et les contres. Pas une fois, et j'en remercie mon entraînement, il ne réussit à me toucher, frappant dans le vide et ne réussissant qu'à ébrécher la terre. Néanmoins, et malgré ces échecs cuisants, je n'eus pas plus de réussite. Car à chaque fois il parvenait à mettre sa masse entre mon épée et lui, sans que je ne comprenne vraiment comment. Jusqu'au coup final: tandis que j'évitais une nouvelle fois de me faire défoncer le crâne par sa masse, et ce à l'aide de quelques pas sur le côté, je décelais une ouverture assez évidente. Je n'avais pas même penser à observer le temps de latence qu'il avait entre le moment où il frappait et celui où il faisait revenir son arme à lui. Dommage que je m'en rende compte aussi tard, il et pourtant si évident. Demeurant sur son flac gauche, je lève mon genou et le frappe directement à l'estomac. Affaiblit, il se penche en avant et lâche son arme pour masser le point de contact. Dernière erreur de sa part. Toujours armé de mon épée, je profite de sa position pour le séparer de sa tête, comme j'avais déjà fais avec beaucoup d'entre eux auparavant. Malheureusement pour lui, je ne réussis pas à couper entièrement l'os, et le pauvre bougre s'écroule au sol, la nuque bien ouverte mais encore conscient. Autant le dire tout de suite, sa fin de vie ne va pas être des plus agréable.