[Quête] Un blason à redorer... [PV Divum Legi]

Le Divum Legi, à l'instar du monde, venait d'entrer dans une ère de grande turbulence dont il ne se tirerait pas sans dommage. Pour commencer, les tensions amorcées entre Solaris et les terres brûlées n'étaient guère de bon aloi : les méfaits de Kuran destinés à empoisonner leurs relations avaient déjà semé la poudre, et ce Duncan Knox n'avait fait que craquer l'allumette qui y mettrait le feu. Syren était en passe de subir de grands changements, et pas dans le bon sens, c'était à craindre. La grande bataille qui avait opposé les deux territoires le stipulait formellement, et si un conflit devait se reproduire, ce qui arriverait à coup sûr à moins d'un miracle, sans doute cela ne s'arrêterait-il pas en si bon chemin. Le pire était à craindre et l'insécurité faisait désormais partie intégrante de la donne. Tous se plaignaient de cette guerre restée en statu quo et des ravages qu'elle pourrait causer, mais pourtant, aucun de ceux-là ne pouvaient comprendre le calvaire qui attendaient les Zéphyrs et le règne de terreur que prévoyait le nouveau maître de la cité qu'ils habitaient jusqu'alors. Outre cet avènement pour le syndicat du crime qui allait donner fort affaire à leur groupe, la guilde la plus réputée de tout Syren devait également faire le deuil d'un des fondateurs qui s'était éteint à la disparition d'une partie conséquente d'Aphélion. Le sort lancé par le dictateur avait dévasté une portion de quartiers qui fut soufflée comme un fétu de paille, de même que les innombrables âmes qui s'y battaient... Y compris le chasseur de prime dont ils n'avaient pas retrouvé la trace.

Étant à proximité au moment de l'incident, Arsiesys avait très clairement entraperçu la silhouette de son camarade s'estomper dans la blancheur du flash lumineux qui avait précédé ce chaos, avant de s'envoler sous la pression du souffle dégagé par la gigantesque explosion. Son réveil n'avait eu lieu qu'une poignée de minutes plus tard, alors qu'il était encastré dans la cloison d'une boutique quelconque. Tout était trouble dans son esprit, et sa principale préoccupation avait été d'aller s'effondrer sur l'Odyssée, étant hors d'état de faire quoi que ce soit d'autre. Les événements précédent cette destruction ne s'étaient remis en place qu'une fois qu'il fut tiré de sa torpeur, faisant connaissance avec ses nombreuses contusions et les bandages qui les avaient recouvertes pendant son repos. Tout n'avait été qu'échec, une fois encore, et la ville était tombée aux mains d'une menace sans égal. De bien sombres nuages se profilaient à l'horizon, que ce soit pour leur alliance, pour Solaris, ou pour la planète au grand complet. Les jours avaient filé à vive allure alors que tous se remettaient des blessures encaissées tant que faire se peut, devant se contenter de sombrer dans l'oisiveté. Se mouvoir et agir tout en étant aussi en forme que des accidentés ne serait que pure folie et pourrait leur coûter la vie. Prendre position dans cette querelle des peuples sans avoir les moyens d'intervenir de tout leur saoul serait stupide et inutilement dangereux. Aussi rageant que cela puisse être, recouvrer leurs forces au préalable était la seule solution acceptable s'ils voulaient faire quelque chose.

Le plus dur pour l'archer de mana n'était pas de demeurer immobile à en perdre la raison mais d'avoir dû conter ce qu'il avait pu voir quand le maître des lieux s'en était emparé dans une démonstration de son grand pouvoir, engendrant l'hécatombe. C'était un aveu difficile à faire, mais non moins nécessaire, et même quelqu'un ayant englouti tant de grande littérature que lui ne savait quels mots employer pour formuler cela correctement, sans accabler plus encore ses camarades. Les nouvelles se suivirent et ne s'améliorèrent pas quand les journaux leur apprirent dans le détail que de nombreux criminels avaient été jetés dans la bataille pour se joindre aux troupes Karnaks, dans le but de s'assurer une potentielle victoire qui n'était jamais venue. Ce qui devait arriver arriva : la plupart d'entre eux couraient encore à ce jour et n'avaient pas regagné sagement l'humidité de leurs cellules compactes, sauf pour les moins dégourdis. Si de nombreux noms avaient fait couler de l'encre sur les pages de la coupure de presse sur laquelle restait rivé le regard d'azur du métisse, l'un d'entre eux revenait régulièrement, l'évoquant comme étant parmi les plus dangereux hors-la-loi recensés. Un adepte des explosifs nommé Adam Genesis, dit le Démon Pourpre. Ce surnom seul en disait long. Et pour finir de semer le doute, on le disait capable de tout faire sauter d'un claquement de doigts. Sans qu'il n'ait eu à y songer, les images de la déflagration reprirent place dans l'esprit d'Arsiesys alors qu'il repliait le journal joint à la missive qui avait été adressée à leur auberge.

Malgré leur déconfiture quand ils durent protéger le baron Garcia Lokharis, leur renommée n'avait cessé de croître et ils n'en étaient que plus sollicités. Or, ce nouveau contrat avait tout pour être prioritaire, surtout si la corrélation pensée par le Sidereus était véridique. Si c'était le cas et que ce sinistre individu était bien lié à la disparition de leur camarade, que ce soit ou non sur ordre du tyran régentant désormais l'empire, remplir cette tâche ne serait pas un travail mais un plaisir personnel. Mis en effervescence par ces informations, l'archer ne tarda pas à arracher ses pansements un à un avant de se diriger d'un pas énergique jusqu'à la salle de réunion dont il ouvrit la porte en grand à l'aide de son pied. Ce n'était pas dans ses manières, mais dans ces circonstances, qui s'en préoccuperait ? Il se contenta de vérifier qu'il y avait quelqu'un sans s'assurer que chaque place était occupée et jeta le quotidien tout juste sorti d'impression devant tous, grand ouvert pour que les gros titres apparaissent même à ceux prenant place en bout de table. Sans commentaire, il alla s'installer sur son propre siège, attendant que l'ordre de mission comme les compléments joints par cette gazette circulent entre les différentes mains pour que tous prennent connaissance de chacun.

Bon, et bien, on pouvait dire que le phénix renaissait de ses cendres! On avait tous eu un peu le cafard, depuis un certain temps, mais le fait de rester à rien faire, se morfondant dans l'enceinte de notre auberge qui semblait se rétrécir à vue d'œil, tout cela faisait qu'on allait sûrement avoir l'un de nous qui allait nous la jouer nervous breakdown. Pour ma part, j'avais de l'occupation, avec toute la gestion post-apocalyptique de finances en tous genre, mais ce n'était pas le cas de tout le monde, et je pouvais admettre que cela pouvait causer des dommages à certains. Chose heureuse en soi, deux nouveaux compères nous avaient rejoins, une sorte de curé bizarre mais plein de bonne volonté, semblant s'y connaitre dans les arts du combat, vu l'épée qu'il portait, et un bon Valkor bien typique, avec du muscle et de l'acier à revendre, genre portier de club privé. Bah, de la chair fraiche, c'était bon et pour le moral, et pour les affaires.

Et puis, heureusement pour nous, le salut vint de notre cactus bleu, qui nous ramena un nouvel objectif: capturer du taulard. Bon, en soi, c'était pas très glorieux, mais se bouger un peu et cogner du méchant remettrait du baume au cœur à tout le monde. Surtout que, lors de son exposé, l'historien fit une description de notre fuyard on ne peu plus alléchante, me donnant subitement envie d'aller lui botter le cul, tout de suite. Ouais, j'étais reparti, comme à la bonne époque. Ça allait envoyer gros. Et puis, si on pouvait rendre la monnaie de sa pièce à tous ces couillons qui prétendaient régenter notre avenir en utilisant les plus tarés des pions dans le jeu, ben j'allais leur montrer que notre grain de sel était capable de bouffer même les plus gros engrenages. Me tournant vers mon compagnon, chose plutôt ardue puisque je m'étais affalé sur mon siège, une sorte de mini trône que j'avais réussi à ramener d'une de mes nombreuses planques ayant réchappé au pillage et à la destruction d'Aphelion, et dont les accoudoirs servaient de support à ma tête et à mes jambes, je signalais mon contentement.

Quoi? un touche d'humour, ça fait pas de mal, hein? Qui a dit qu'on devait continuer à parler posément, et faire gaffe aux sujets à aborder? On était pas chez les pleureuses, alors ben, j'essayais de montrer à tout le monde qu'aller de l'avant avait du bon...bon je m'y prenait peut être pas de la meilleure des façons, soit, mais les gars me connaissaient, dans l'ensemble, et savaient que mon trait de caractère enjoué était ce qu'il était, et que le changé aurait été comparable à apprécier une étreinte odorante avec un Borick pas frais. Restait plus qu'à nous préparer, et en voiture Simone!

Il fallait s’y attendre à ça, Casey…

Matthew avait en tout point raison et je devais l’admettre : je me suis trompé en pensant que Knox nous laisserait tranquille. Pourquoi pensai-je cela ? Je vais vous expliquer. Père, Dominic Rowen Sénateur Argonate, m’avait envoyé une grande enveloppe, laquelle contenait plusieurs documents importants. Il y avait aussi des lettres de lui, m’expliquant très précisément ce qu’il se passait à Aphelion depuis la prise de pouvoir du tyran : enlèvement, surveillance, assassinat… Tous ces méfaits devenaient de plus en plus courants sur Solaris et ils ne s’abattaient uniquement sur les humains dotés d’ailes ou bien ceux qui vivent sur mes terres natales, qui ne sont guère Zéphyr et qui contestent la politique de Duncan Knox. Cet homme est une véritable honte à ma culture et quand bien même nous pourrions mettre fin à ses projets et à son règne machiavélique, tout le mal qu’il a causé aura de grandes conséquences quand à la renommée des Argonates aux yeux du monde. Il nous faudra des décennies pour regagner notre innocence pour les autres cultures… Peut-être même ne pourrons nous jamais la réacquérir.

Les autres feuilles parlaient de l’exécution publique d’un grand nombre de Sénateurs de l’Empire, ce qui me mit dans une rage folle. Rares étaient les politiciens de ma terre natale que je n’avais jamais fréquenté au moins une fois et savoir que ce salopard les avait supprimé me dégoûtait plus que tout. Mais le clou du spectacle fut la nouvelle concernant le Divum Legi : nous étions recherchés par l’Empire Solaris et ses esclaves, les Eclipsi. Sur l’article que mon Père m’avait envoyé, on pouvait reconnaître très facilement les visages d’Arsiesys, Stilgard et de ma personne. Le visage du défunt Sidereus Veith y était aussi mais son portrait était barré par une grande croix rouge, faisant comprendre clairement que le membre du Legi était décédé. Duncan Knox n’y allait pas par quatre chemins avec nous : ils voulaient nos têtes. Reste à savoir si c’est pour dissuader les autres Guildes à se mettre au travers de son chemin ou si c’est à cause de moi, qui est le fils d’un Sénateur n’approuvant nullement les actes de l’Argonate.

La seule idée et objectif qui circulait dans ma tête en ce moment fut celui de prendre l’Odyssée, accompagné seulement de Matthew Scott mon Navigateur et ami, et de retourner à Aphelion. Pour quoi faire ? Pour m’occuper de Duncan Knox et mettre fin à ses jours ? Non, du moins pas de suite… Je comptai partir à la recherche, discrètement, de Jack Harper. Je ne savais pas ce que pensait l’Argonate du règne de Knox mais peut-être allait-il m’offrir son aide…



Que je suis stupide ! Mon désir de sauver mes terres et de faire de nouveau briller le blason des Argonates était tel que j’étais prêt à faire n’importe quoi, même quelque chose de complètement sot. Demander de l’aide à Jack Harper ! Et puis encore ? Quand bien même obtiendrai-je son soutien et que nous réussissions à abattre l’ennemi, Harper s’empresserait de me doubler et de me tuer afin de prendre le pouvoir. Et puis, partir seul, sans mes autres compagnons. Sans mes amis Arsiesys et Stilgard… Vraiment, je dois cesser d’agir comme un enfant sinon, je pourrai précipiter ma mort… Voir même, entraîner la chute de notre alliance, le Divum Legi… Je dois agir plus sagement et ce, dès maintenant. Je ferai mieux de consulter mes camarades, afin de décider quelles seront nos prochaines actions. C’est pour cela que je quitte la pièce qui n’est connue que d’Arseisys, Stilgard et moi-même car c’est dans cette dernière que les plus hauts gradés de notre groupe se retrouvaient et adoptaient des décisions importantes pour la Guilde des Cieux.
Après une petite traversée dans les couloirs de la grande taverne nous servant de quartier général, le tout accompagné par Matthew, je suis apparu dans la partie publique du lieu. Là, de nombreuses personnes étaient assises sur les banquettes, des verres remplies de bière, de whisky et autres posés sur la table, l’une de leurs mains tenant fermement les objets transparents. Certains possédaient cela uniquement pour ne pas se ridiculiser (et révéler ainsi leur dégoût pour l’alcool… Dommage pour eux, ils ne savent pas ce qu’ils manquent), d’autres l’avaient vides car ils s’amusaient à le boire cul sec… D’ailleurs, ils ne restaient pas souvent sur les banquettes… Mais évitons de rentrer dans les détails. A une table un peu plus loin, je vis trois hommes assis, en train de discuter. La chevelure saphir de l’un et l’air enjoué de l’autre me suffirent pour les reconnaître et les approcher : Arsiesys et Stilgard. En arrivant vers eux, je les entendis parler d’un type, un certain Adam Genesis. Près d’eux, je vis un journal qui présentait cet homme en première page. Je pris l’épais morceau de papier et le consulta. Bien que j’avais décidé de consulter les autres avant de donner le feu vert à un de nos plans, je préférais revenir sur ma parole. Regardant les autres membres du Legi, je me suis adressé à eux.

Ce type use donc de ses talents pour faire régner la terreur sur tout Syren… On a déjà Knox, pas besoin d’un autre comique pour ça. Arsiesys, Stilgard ! Préparez votre équipement, on part régler ça de nous-même. Toi aussi le nouveau, prépare ton armement car tu vas venir avec nous. On se rejoint tous dans « l’Odyssée »…

Rangeant le journal dans l’une des poches de ma longue veste noire, je fis quelque pas en direction de la porte de sortie, tout en faisant un mouvement de la main pour faire comprendre à mon Navigateur que nous repartions à l’aventure. Ouvrant la porte, je ne la franchis pas, attendant mes compagnons. Après tout, pourquoi être pressé : tant qu’ils ne seraient prêt, je ne pourrai m’en aller, alors bon…