Froid & historien [Co Ars]

Mon navire solidement arrimé, je contemple les étendues glacées devant moi. Enfin, quand je dis solidement arrimé… Je devrai plutôt dire gelé contre la paroi. Nous sommes sur l'une des îles les plus froides du royaume Valkor, et ce n'est pas de gaieté de cœur. Si je suis là, c'est pour rencontrer un mec bien précis, et on m'a indiqué ici. Encore un miracle que j'ai réussi à communiquer; je crois que je suis tellement gelé que je pourrais à peine faire un mouvement. Bref. J'exagère peut-être un peu. Je parcours l'étendue du regard, et localise à sa tignasse bleue l'individu qui m'intéresse. Il s'agit d'un historien dont la notoriété commence à être grande. Moins grande, certes, que celle de Samuel… Mais il reste selon les dires des foules l'historien majeur de cette époque. En plus de cela, il est membres du Divium Legi, la guilde impliquée dans la défense du Baron assassiné en terre Valkor. D'où ma venue ici… Nous devons en savoir plus, si on veut avoir la moindre chance contre Duncan. Bon, j'avoue, j'empiète peut-être un peu légèrement sur le domaine de Samuel, qui s'étaient octroyé cette mission. Mais, cela dit, lui devais également répondre à d'autre obligation liées à Babel – notamment la seconde expédition au Temple du Savoir, où encore cette mission dont il m'a semblé entendre parler à propos de Rassik, ou une autre bête avec un nom du genre. Dans le doute, disons Rassik… Bref. J'entame la descente, direction le mec bleu chevelu. Enfin, chevelu bleu, pour respecter exactement la chronologie. Eh puis, question capillaire, je ferais mieux de ne pas trop la ramener: moi aussi, il arrive à mes cheveux d'avoir des reflets bleus – même s'ils restent la plupart du temps noirs de jais. Dans tout les cas, je ferais bien de garder ma langue dans ma poche. Non seulement il fait froid, mais en plus je me dois de lui soutirer un minimum d'information – sans quoi Sam sera fort fâché. De plus, il paraît que c'est barbare de taper sur les historiens. Je soutiens le contraire, mais il faut penser à l'image de Babel avant ses convictions personnelles… J'entame la descente de la piste et arrive rapidement près de lui, l'interpelant.

-Holà, l'ami! Vous vous nommez bien Arsiesys, je ne me trompe pas? Je me présente, Segsimundo Andredago. Je suis Vedan, Dirigeant de Babel, et membre honoraire de La Fondation Pour la Magie d'Amalsys. Cela ne vous dit probablement rien, mais j'aurais quelques questions à vous poser, si vous pouvez m'accorder un minimum de temps. Votre réputation d'historien n'est pas à faire – ni celle de combattant, qui vous a précédé. On dit également de vous que vous êtes membre de la puissante guilde Divium Legi. Je me trompe?

Certes, ça fait un peu flagorneur, mais après tout, un peu de flatterie n'as jamais fait de mal à personne, n'est-ce pas? Si cela peut le mettre dans de bonnes dispositions pour la suite, cela ne me pose pas de problème de devoir mentir un peu. Surtout qu'ici, ce n'est quasiment pas un mensonge: on le considère réellement comme l'un des plus grands combattant de Babel. Une notoriété que j'espère mal acquise… je claque des dents, et sautille d'un pied sur l'autre en attendant sa réponse.

L'esprit de l'archiviste naviguait entre deux rives depuis les récents faits qui l'avaient laissé sur le carreau, mortellement blessé et à deux doigts d'y passer. À la fois concentré et dissipé sans savoir à quel saint se vouer, ses moments d'absence n'étaient d'aucune rareté, et il n'était pas exceptionnel ces jours-ci qu'il faille s'y reprendre à plusieurs fois pour lui faire entendre même la plus succinte des banalités. C'était comme si un élément inconnu empêchait son esprit de tenir en place et le faisait vagabonder en tous sens, s'éparpiller, espérant qu'il s'égare dans un coin d'où il aurait bien du mal à revenir pour laisser sa place vacante... En tous les cas, ses sens comme ses réflexes s'émoussaient, et tomber dans un traquenard alors qu'il n'était pas au mieux de sa forme serait des plus dangereux. Particulièrement maintenant qu'il avait appris qu'une prime relativement élevée pesait sur sa tête, et tous ceux en chassant risquaient de venir lui rendre visite s'il faisait savoir sa présence. Ce n'était certes pas dans l'archipel qu'on l'avait mis à prix, mais rien n'empêcherait ces charognards de faire le voyage, ou à certains locaux de vouloir arranger la pauvreté de leur logis en venant en aide à une autre législation. Vouloir l'attraper pour autrui était envisageable, et étant une proie facile, ou en tout cas la plus abordable à ce point de vue de toute la guilde à l'heure actuelle, il eut été totalement déraisonné de se montrer à visage découvert en public.

C'est pourquoi lors de ses sorties, espacées autant que faire se peut pour ne pas attirer l'attention et minimiser les risques d'être pris au piège sous l'égide de quelques vénals vautours, sa bure était fixée de sorte à ne rien laisser paraître et sa capuche se rabattait sur sa face de toute sa taille pour n'en laisser entrevoir qu'un strict minimum. Il fallait savoir que la moindre mèche passant sous les yeux de l'un des traqueurs pouvait conduire à une mise à feu et à sang de tous les patelins environnants pour le faire sortir de sa tanière, pour les intéressés les plus cupides et extrêmistes. Que d'ennuis en perspective, et ce uniquement parce que les actes les opposaient au règne despotique de celui qui se proclamait nouvel empereur de Solaris par sa seule voix, la considérant comme une unanimité à laquelle nul ne pouvait porter atteinte sans être publiquement mis à mort dans l'heure. Seule la peur donnait du corps à son joug, oppressant les peuples sous sa tyrannie. Qui pouvait contrecarrer ses rêves de grandeur, si ce n'est les plus grandes alliances de ce monde ? Les guildes les plus connues de tout Syren devaient se mettre en branle pour renverser ce démon et lui faire regretter ses crimes, les faisant payer au centuple.

Ce n'était qu'ensemble qu'ils pourraient faire quelque chose contre une organisation aussi vaste et tentaculaire que l'étaient les Eclipsis, sans compter sur le fait que, par son réseau comme grâce aux richesses de son nouveau domaine, ce Duncan avait pu s'allouer les services d'autres groupes d'importance pour parfaire sa suprématie. On n'est jamais trop prudent, et les personnages vicieux dans son genre, nourrissant dans l'ombre leurs ambitions démesurées, tendaient à faire valoir ce proverbe à sa juste valeur. Ce ne pourrait qu'être une épine de plus dans le cactus planté dans le pied du globe au grand complet. Si ce n'est les criminels amnistiés par la folie conquérante de cet Argonate aux grands pouvoirs, qui pouvait jubiler en sachant la cité des anges au main d'un assassin, d'un fanatique de la guerre moissonnant les âmes sans scrupule comme si ce n'étaient qu'autant d'épis de blé sous la faux de ses noirs desseins ? Il fallait arrêter la machine infernale avant qu'elle ne s'emballe, sans quoi il finirait par être trop tard, et personne ne pourrait plus agir pour faire choir son trône maléfique de là où il l'avait installé selon ses propres désirs. Que de sombres nuages obscurcissant le ciel plus azuré que ses prunelles de ses pensées alors qu'il quittait d'un pas vif une échoppe ou il avait acheté de quoi procéder à quelques modifications physiques sur sa propre personne. Style vestimentaire, couleur de cheveux...

Car oui, l'on ne pouvait pas dire que le coloris océanique de sa chevelure soit fait pour passer inaperçu. D'après son compère voleur, c'était même ce qui permettait de le localsier dans une foule aussi dense soit-elle, nonobstant son charisme. Alors s'ils voulaient faire profil bas, remédier à cette originalité, au moins passagèrement, paraissait être la première chose à faire. C'était pour le bien de tous, même s'il allait regretter de ne plus posséder cette tignasse à laquelle il s'était fait depuis l'enfance. Mais les circonstances l'exigeaient, et mettre leur peau en sûreté était préférable à l'entretien de son bien-être capillaire. Transpirant à grosses gouttes dans la chaleur de l'espace contigu de ce magasin plus convivial que d'une époustouflante grandeur, il se permit d'oter sa coiffe pour respirer un bon coup. La rue n'était que fort peu peuplée et il pouvait se permettre ce caprice salvateur, puisque cela l'empêchait de décéder sur place par manque d'oxygénation. Sentir à nouveau ses mèches cascader sur ses épaules fut un grand soulagement, même si cela équivalait à la promesse d'un calvaire quand il devrait leur faire réintégrer le carcan du tissu pour ne rien laisser paraitre de leur teinte atypique. La boutique à peine quittée avec quelques sacs sous le bras pour remplumer une garde-robe inexistante, le tout pour une fort coquette somme qui devrait rassurer le commerçant sur sa recette de la journée, une voix l'interpelle en long et en large dans un monologue qui lui laisse comprendre qu'en plus d'avoir un don pour mettre les pieds dans le plat, le responsable de cette révélation aime s'étendre lorsqu'il s'exprime.

Pris de panique, l'historien exerça une grande pression dans le dos de l'inconnu pour l'attirer dans l'enceinte d'un logis adjacent, laissé à l'abandon et cloitré par des planches de bois épandues sur sa surface, maladroitement clouées pour ne laisser aucune voie d'accès. Cependant, sa vente avait duré et le matériau, dans l'humidité polaire du climat local, en avait pris un coup. Le barrage céda d'une pression de la paume tout ce qu'il y a de plus désuète et il ouvrit la porte avant de la refermer derrière eux, content de mettre la main sur cet abri inopiné après avoir été exposé à tous. Faisant volte-face, il posa son fardeau hors de prix contre le mur et avisa rapidement l'extérieur, s'assurant qu'aucune silhouette ne faisait mine de s'intéresser à la demeure en question après qu'il ait été percé à jour. Hors de vue, il pouvait défaire partiellement son costume et entrouvrit sa bure pour récupérer une plus grande mobilité, quelques craquements articulatoires montrant que l'étroitesse de ce voile dissimulant était source de courbatures. Poussant un long soupir pour s'aider dans sa détente, il revint à l'individu responsable de cette frayeur, esquissant tout de même un sourire courtois.

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...En effet, c'est bien moi. Comme vous avez pu vous en rendre compte, je préfère que cela ne se sache pas. Vous ne devez pas être sans savoir que les méthodes de ce cher Duncan Knox ne sont pas des plus raffinées, et ma tête ainsi que celles de mes compagnons étant quémandée en échange d'une copieuse somme, vous comprendrez qu'éviter que cela s'ébruite est mon principal souci. La faute est mienne : je n'ai pas été assez vigilant. Mais passons.

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Babel, avait-il dit. C'était le principal rassemblement de tout Syren avec le leur, et ils rivalisaient de renommée avec le Divum Legi, au point que l'on ne puisse les départager. Leur domaine de compétence avaient beau être radicalement différents, cela n'empêchait pas les tiers de vouloir créer une sorte de classement, et c'étaient là les deux noms surgissant le plus souvent des discussions portées sur ce thème. Autrement dit, c'était aussi les personnes les plus douées avec leur propre groupe, et les propriétaires de la première porte à laquelle frapper si une entraide devait être prévue pour remédier à la situation d'Aphélion et de ses autochtones. Cette rencontre n'était pas que fortuite, et il fallait en profiter pour voir ce qui pourrait être puisé d'une collaboration entre les deux organismes, et si cela pouvait arranger cette décadence plus que dérangeante. Autant ne pas jouer sur les apparences : si ses dires étaient véridiques, il n'y avait pas à se faire de souci.

Et dans le cas contraire, si ce n'était qu'une couverture faite pour l'approcher et le poignarder dans le dos, il aurait tôt fait de s'en défaire, comme de tous ceux qui avaient eu le cran de croire que sa profession le rendait démuni une fois en combat. En cas de duel, il se savait à même de l'emporter, ou du moins de prendre la fuite à toutes jambes contre un adversaire trop costaud malgré sa négligence involontaire de ces récents jours. Tout en restant un minimum sur ses gardes pour parer à un coup fourré tant qu'il n'aurait pas la certitude que cet homme était bien celui qu'il prétend, il s'assit sur le rebord de fenêtre, prenant appui contre la barricade pour prendre une grande inspiration. Ce faisant, il releva légèrement un pan de sa cape pour mettre à vue le symbole d'argent significatif de son engagement au sein du Divum Legi. Il s'en servait d'ordinaire en tant que broche, mais les recherches lancées à son encontre rendaient préférable le rangement de cet accessoire dans un repli de vêtement où il ne pourrait être relevé que si son détenteur y consentait.

Vous avez vu juste : je suis l'un des représentants du Divum Legi, et je suis honoré de recevoir votre visite. Votre nom ne m'est pas inconnu également, mais je ne saurais dire si c'est du fait de ma profession ou de celle des informations que l'on me confie de toutes parts. Quoi qu'il en soit, sachez que je connais tout ce qu'il y a à savoir sur vous et vos acolytes. Pour ce qui est de votre requête, je pense pouvoir y accéder... Si tant est que je puisse vous faire confiance.

Cette phrase était tombée tel un couperet, s'interposant dans les politesses échangées par les interlocuteurs pour mettre au point ce détail plus que préoccupant. En effet, dire que sa seule présentation suffisait à l'exempter de tout soupçon eut été un comportement à haut risque, potentiellement des plus regrettable si ces prémices d'accusation étaient fondés. Rien ne laissait entendre qu'il avait en face de lui un dangereux meurtrier, mais l'habit ne fait pas le moine, et il devait s'attendre à tout de la part de tout le monde pour être véritablement prêt à se tirer d'un guêpier s'il venait à poser le pied dedans sans s'en rendre compte. C'était compréhensible, globalement. À voir si cela l'était pour le dénommé Segismundo avec lequel il discutait.

Comprenez que je m'avère méfiant, par les temps qui courent. Les buts de Babel ont beau ne pas concorder avec la mégalomanie du tyran susnommé, je ne sais de vous que ce que j'en ai lu et entendu, et rien ne m'atteste votre bonne foi. Vous m'en voyez désolé, ne l'interprétez point comme un outrage... Toutefois, vous ne vous seriez certainement pas gêné pour me mettre à mort dès que vous m'avez distingué si tel était votre objectif, à moins que vous attendiez de moi que je vous mène aux autres pour réaliser une prise massive. Ce qui eut été suicidaire, puisque cela reviendrait à nous défier sur notre propre terrain et en infériorité numérique. Je reconnais que nous ne sommes point invincibles, mais de là à braver la mort en nous attaquant dans notre effectif complet... Nul ne peut y faire face seul décemment, à mon sens.

Il avait joint les mains pour en faire un support pour son menton, réfléchissant à toute allure tout en débitant ce flot de paroles plus conséquent qu'il ne l'avait été depuis des lustres. L'influence de son visiteur, supposa-t-il avec une pointe d'humour, avant de quitter sa posture pour se gratter sommairement l'arrière du crâne. Ses mécanismes cérébraux n'arrivaient à aucune idée satisfaisante qui pourraient l'aider à écarter toute supposition négative pesant sur ce messager venu depuis Amalsys pour les rencontrer, s'il s'en fiait à ce qu'il savait de l'emplacement du siège de l'autre guilde. Dilemme, dilemme... Ne pouvant s'en remettre à ses pensées embrumées, il reprit d'un ton plus optimiste.

Auriez-vous une idée de la façon de faire pour me rassurer sur votre identité et vos projets à mon égard, messire ?

Citation :

Parpaing, parce que je le vaux bien : + 4 XP.

J'écoute attentivement l'historien qui me fait face, apparemment insensible au froid, me débiter des répliques quand au fait qu'il a entendu parler de moi, et même lu des choses à propos de Babel. Hum, flatteur. Si des auteurs s'intéressent déjà à Babel… Bref. Tout ça pour finir sur une histoire de confiance. Genre je suis un mec en qui on ne peut pas avoir confiance. Bon, j'avoue, je ne suis peut-être pas le type le plus fiable de la création, mais quand même… C'est un peu rude de me stigmatiser de la sorte. Bref. Je réfléchis un instant, composant une réplique cohérente. Quelque chose qui prouverais ma confiance. Des témoignages de gens de Babel pourraient faire l'affaire, mais je n'en ai pas trop sous la main pour l'instant. Normal, qui viendrais se les geler ici, je vous le demande? Non, soyez franc. D'un côté, on vous expose les Baronnies, où il fait chaud, beau, et où se trouvent le Casino d'Eldorado (les plaines fertiles locales) et Amalsys, l'endroit le plus civilisé depuis la chute d'Aphelion. De l'autre, vous mettez dans la balance des sortes de cailloux glacés ou je n'ai pas encore vu une ville digne de ce nom, et où on se fait agresser toute les dix minutes par des lions albinos. Pas top, vous en conviendrez. Bref. Dans tout les cas, cela signifie explicitement que je n'ai pas de membre de Babel sous la main. Je doute qu'un bout de papier signé le convainc de mes bonnes intentions, ce serait trop facile. Bref. Une idée me vient alors à l'esprit. Un petit duel pourrait prouver ma sincérité. Dans tout les cas, c'est top. Si je gagne, s'il ne parle pas je l'émascule; s'il gagne, il sera assuré de ma bonne foi. Dur de mentir quand sa vie est dans la balance; même moi je serais honnête. Bref. Il me semble que c'est le moment parfait pour exposer ma théorie. J'ouvre la bouche et prend la parole d'une voix grave.

-Rien, en effet, ne te prouve ma bonne foi. Mais, à charge de revanche, je te signalerais qu'il en va de même pour toi… Eh bien, je te propose un petit jeu. Ta réputation de combattant accompli n'est plus à faire; battons-nous. Le perdant est obligé de dire la vérité. Tu me diras, ça ne nous engage pas plus; mais je te sais être un homme d'honneur – et j'espère en être un. C'est parti?

Nous nous jaugeons, puis commençons rapidement à avancer. Enfin, surtout moi, car lui, il avance peu, et me décoche une flèche qui s'écrase sur la couche blanche qui tapisse le sol. Houlà! Je ralentis, l'espace d'un instant. Il une espèce de truc fluorescent, dont un aura puissante ce dégage. Un arc de mana. Ah, tien, je viens de comprendre d'où il tire son surnom de "l'Archer de Mana". Hum, intéressant, mais ça doit sans conteste lui bouffer plein d'énergie. Enfin, ça doit quand même être puissant, vu comme ça à fait fondre la couche de neige. Je fais un nouveau pas en avant, recommençant ma marche. Hum, si j'arrive au contact, je pourrais concentrer mon aura pour lui exploser la tête, causant des dommages importants. Bref, le tout, c'est encore d'arriver au contact, sans me faire déchirer par ces flèches qui, je vous le dit franchement, ne m'agrée guère. Bref. Je continue d'avancer, il continue de me tirer dessus. Sa deuxième flèche, plus précise que la première, me transperce la cuisse de part en part. La blessure est rude, mais pas mortelle. Je décide de continuer malgré tout d'avancer. Ce tenir au plan de départ est encore la meilleure solution, il me semble. Mais il faut que je me presse, notre homme réencoche déjà. Cette flèche-ci, je la vois venir. Je peux, sans conteste, l'esquiver. Il me suffit de me déporter légèrement sur la droite pour qu'elle file. La flèche part, je mets mon plan à exécution. LA flèche Vien se ficher dans mon épaule gauche. Hum, j'avais négligé la neige; non seulement celle-ci enserre mes pied et réduis ma mobilité, mais également manque de me faire choir. En plus, c'est froid. Je hais ce truc. C'est joli, mais si on recherche la beauté, je suis sur qu'on peut trouvée une beauté un peu moins glaciale. Je me décide à provoquer un peu mon adversaire, souhaitant lui faire perdre son calme. Un adversaire moins concentré est toujours moins redoutable.

-Eh bien, ne saurais-tu te battre que comme un lâche, avec un arc? Les seuls blessures que tu es capable de m'infliger seront des flèches? Comptes-tu renâcler et fuir le combat, où approcher et te battre comme un homme?

Après coup, en repensant à cette réplique, je me dis que finalement, c'est complètement con de titiller un Berserk plus fort que vous. Mais sur le coup, ça paraissait extrêmement sensé. Bref. Stoppons cette introspection, retours dans le présent. Je me rapproche, avec l'intention manifeste de lui exploser à la tête comme prévu. Je commence déjà à réunir mon mana tout autours de moi, comme un manteau. Je sens l'aura de puissance qui m'entoure, réchauffant mon cœur et faisant courir du mana dans mes veines. Mon rythme cardiaque s'accélère, ma respiration également. Mes pupilles se dilatent. J'adore cette sensation de mana s'accumulant dans mon corps. C'est si jouissif… Il existe des récits de personne qui se sont, ainsi, perdu dans le flux de mana. C'est, parait-il, un destin terrible. Se laisser emporter par les flux de mana laisse le corps vide et bavant, transformé en légume incapable de se nourrir par soi-même. Mais quelque part en moi, je pense que l'esprit doit être en perpétuelle ébullition, dans un flot de plaisir permanent. Quoi qu'on en dise, le mana est terriblement addictif. Bref. L'homme en face de moi réagit lui aussi. Il tire une paire de couteau de combat, scintillant comme le givre qui nous environne. Quelles sont donc ces étranges armes? A voir la matière, on dirait de l'artefact, et l'aura d'énergie qui s'en dégage semble confirmer ce fait. Bon. Il est temps que je libère mon énergie. Une énorme explosion m'entoure, des flammes d'énergie pure léchant le ciel tout autours de mon corps. Voilà qui est magnifique. L'espace d'un instant, je ne sens même plus le froid qui quelques secondes auparavant faisait frissonner ma peau. Je regarde autours de moi, recherchant notre historien. Je sens comme une piqure d'insecte au niveau de mon épaule. Je regarde, et vois une lame qui en dépasse.

Premier choc. Ground zero. Déflagration. L'excitation liée au mana retombe en même temps que la douleur arrive. Et que je réalise que mon adversaire, esquivant habilement l'attaque, est passé dans mon dos et viens de me transpercer de part en part. C'est extrêmement douloureux. Je crache du sang, qui se répand sur la neige. Un sourire orne toutefois mes lèvres. C'est un bâtard, mais un bâtard sacrément doué, il faut le reconnaître. Sa réputation n'est en rien usurpée… Bref. Même si je suis en mauvaise posture, le combat n'est pas finit. Loin de là, j'ai encore une chance de me ressaisir. Elle est mince, j'en conviens, mais elle existe, et j'ai bien l'intention de la saisir. Je fais volte-face, dégageant ainsi avec une grimace de douleur le poignard de ma chair… Pour me retrouver nez à nez avec son jumeau, qui me plonge directement dans l'estomac. Outch. Je ne l'avais plus en tête, celui-là. Encore que, je préfère l'avoir dans le ventre que dans la tête, à tout choisir. Mais ce n'est pas particulièrement agréable. Contrairement au précédent, je crois que ce coup-là, il sonne le glas du combat. Je me laisse tomber à terre, m'affalant dans la neige, demandant grâce.

-Ha, ok, tu traite les affaires sur un ton un peu rude, dis-moi… Bref. Me voilà, gisant comme un pantin, entièrement à ta merci. Désormais, tu sais que je ne suis pas une menace pour toi… Je serais bien incapable de faire encore un mouvement. Si tu le permets, je vais soigner quelques plaies, histoire d'éviter de perdre trop de sang… Même si on peut aussi régénérer le sang, tomber dans l'inconscience m'énerverais fort… Bref. Venons-en au fait de ma venue ici. Je ne porte pas Duncan dans mon cœur, et toi non plus. Nous avons tout intérêt à coopérer… T'en rend-tu compte? Cependant, tu le conçois facilement, il maîtrise les armées de deux nations… Ce serait suicidaire de l'attaquer de front. Cependant, nous le savons responsable de la mort de Garcia Lokharis, le Baron dont vous étiez chargé de la protection, si je ne m'abuse. Avec ce fait, il s'est aliéné toute la nation Vedane. Je ne sais pas si vous le savez, mais les Barons sont extrêmement appréciés par la population. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'ils sont Barons… Bref, la direction de Babel a vraiment été affligée par la mort de ce Baron. On a ainsi décidé une série de mesure pour lutter de manière plus diffuse contre Duncan. Ce que je vais te dire est extrêmement confidentiel. Ce n'est pas sensé sortir de la salle de réunion sécurisée de Babel, mais vu le paysage, je doute fort que des oreilles indiscrète soit dans le coin… Et j'ai perdu, après tout. Je dois parler, n'est-ce pas? Bref. Les fortifications du complexe babélien ont commencé, et on commence à réunir un semblant d'armée de vieumaurs, soldat dont la vie importe peu mais qui peuvent être un avantage décisif au combat… En parallèle, on vent des armes aux rares factions solarienne rebelles, espérant ainsi une déstabilisation du régime de Duncan. Si vous pouviez nous livrer le nom des agresseurs du Baron, non seulement on serait en mesure de le venger – on possède des combattants plus doués que moi… – mais en outre nous pourrions peut-être remonter jusqu'à Duncan via cette voie… Vous le voyez, j'ai parlé en toute franchise… Si vous pouviez répondre de la même manière…

Je commence à utiliser mes dons de régénérations sur mes plaies, au fur et à mesures que le flot de parole sort de ma bouche. La plaie au ventre est déjà refermée et, même si elle reste douloureuse, elle ne met certainement pas mes jours en danger. Ma blessure à l'épaule est plus sérieuse, mais j'ai déjà commencé à la refermer. On s'occupera des deux autres plus tard. Je lève les yeux sur Arsiesys, attendant une réponse à mon discours…

Etant l'auteur du quiproquo qui y avait conduit, Arsiesys ne pouvait décemment pas aller contre cette proposition, malgré les plaies que cela impliquait. Dans le pire des cas, il pourrait toujours assurer les premiers soins en cas d'écorchures trop importances grâce à ses talents magiques... Tout du moins, si ce n'était pas lui qui devait bénéficier de ces médications mystiques, et il allait tout faire pour que cela n'arrive point. La hantise de l'échec instillait dans ses entrailles un virulent poison le rongeant intérieurement, infectant ses viscères d'une peur grandissante. Ce qui ne l'empêcherait toutefois pas de livrer un résultat optimal, galvanisé par cette indéfectible appréhension en plein festin au coeur de ses viscères. La plénitude du flux de pouvoir circulant dans ses veines fit place nette dans cette tourmente, évinçant les tracas alors que l'onde le traversait, l'éveillait. L'ataraxie parfaite le replaçait au centre de cette sagesse qui le représentait avec tant d'exactitude et le libérait des chaînes de la crainte, clé universelle à toutes les phobies, délivrant de tout poids superflu pour laisser déferler tout le potentiel de cette aura transcendante enveloppant la grâce de sa silhouette d'un halo aux nuances océaniques. L'expulsion se faisait par chaque pore de sa peau, et formait une masse si compacte que son coloris et sa pression envahissaient l'atmosphère sans que quelque obstacle que ce soit puisse réprimer cette brusque émanation. Ce souffle surnaturel redonnait toute son assurance à ce corps dont toutes les douleurs et les regrets s'envolaient à son aide, l'aidant à mettre à nouveau le pied à l'étrier et à se remettre en selle pour pouvoir refaire son entrée dans l'arène des âmes valeureuses prêtes à livrer bataille.

Je ne me revendique pas combattant... Contentons-nous de dire que je suis doté de facultés grâce auxquelles je puis me défendre en cas de besoin, sans plus, mais je suis loin d'égaler les réelles sommités de ces arts... Mais soit. Battons-nous. Vos conditions me conviennent. Soyons prudents, néanmoins : Syren souffre déjà d'un état d'alerte assez critique pour que ses défenseurs ne se maltraitent point au cours de querelles intestines. Il ne pourrait qu'être nuisible d'amputer la résistance de certains de ses membres à l'aube d'une guerre nouvelle. Si tant est que nous sommes tout deux ce que nous prétendons être, cela va de soi...

Edifiant sur ses traits un maigre sourire, il en fit de même en son poing en se livrant à la concentration nécessaire pour donner naissance à son arme onirique et à son rayonnement s'assortissant à celui de l'étrange exhalaison que projetait sa svelte silhouette. Fin prêt à se dévouer dans le déroulement de ce pugilat s'annonçant dantesque, l'Artemis scintillant aussi joliment que ses traits pouvaient être mortels dans un contraste édifiant s'axant sur le principe que l'habit ne fait pas le moine. Les coups fusèrent, et en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, la balance de l'équité bascula abruptement pour lui conférer un irréversible avantage que finirent de ciseler ses lames dans la chair réfrigérée du représentant de Babel. Originellement réticent à l'idée de lacérer et découper cet émissaire diplomatique, il s'était finalement laissé succomber à ce choix en s'appliquant pour que les stigmates laissés soient les plus nets possibles, facilitant ainsi leur guérison. Comme il l'avait souligné, le but était de se départager et de faire la part des choses entre vérité et tromperie, pas de réduire l'un d'entre eux à l'état d'amas charnel ruisselant de la rougeur du sang. Cette initiative ne relevait nullement des puériles provocations de son partenaire, mais lui était venue spontanément sous l'égide du rapprochement du Vedan. La principale spécificité de cette alternance des instruments avait été l'absence d'hésitation dans son geste : c'était ce qui avait déterminé sa défaite dans la joute contre son ennemi juré. Le doute dans le choix de ces coutelas adamantins et le manque de rodage dans leur maniement. Il ne devait non seulement plus craindre de s'en saisir si cela pouvait l'assister, mais aussi accroître sa maîtrise de cet équipement secondaire pour que son manque de connaissance jamais plus ne lui fasse défaut. Dès que la résistance des muscles et des nerfs vinrent s'opposer à l'introduction de son affuté poignard, l'archiviste sut avoir emprunté le seul sentier pouvant aboutir à cette brillante destination qu'était la victoire.

Bien qu'âpre, le combat avait été bien plus court que tout ce à quoi le fils du désert avait pu s'attendre. Sans doute était-ce du au fait que son dernier affrontement remonte à la défaite subie contre Kuran, et qu'il ne voulait surtout pas connaître à nouveau l'intense faiblesse qui accable le corps aussi bien que l'esprit quand l'on est terrassé par plus fort que soi. L'historien ignorait tout du style de son adversaire, de son niveau jusqu'à sa façon de faire une fois mis en situation. Tout ce qu'il savait était qu'il devait gagner et le battre à plate couture, sans pour autant reléguer au second plan ses fonctions. Aussi s'efforça-t-il d'accumuler un maximum d'informations sur le savoir-faire martial de son antagoniste en surmontant la frénésie qui s'était emparée de lui à la perspective d'un combat qu'il n'avait pu refuser par concession. Cela restait parsemé de cruels vides et manquements que seule la répétition de cette brutale représentation pourrait emplir prochainement. Ce n'était pas prévu, mais nul ne peut savoir ce que réserve l'avenir... C'en était fini de cette probation musclée et l'archer de mana salua cet achèvement en briquant sommairement les couteaux « Ajite » pour en séparer les souillures écarlates laissées par le sang de son opposant avant de leur faire réintégrer leur gaine secrète d'un geste sec, les faisant disparaitre de la vue de tous - en l'occurence résumés à ce Segismundo. Ceci étant, il leva la main à proximité des résidus de cette lutte pour aider son vis à vis à les effacer de son épiderme. Le concerné avait l'air d'être au point également pour ce qui est de la régénération, mais leurs efforts conjugués ne pouvaient qu'aider à l'accélération du processus guérisseur. Tout à ce coup de main, il ne perdit pas de vue l'écoute des dires du perdant - qui avait décidément la langue plus que bien pendue.

Prenez garde, compagnon, vous risqueriez de finir par vous mordre la langue, à vous montrer si loquace tout propos. J'atteste que nous avons beaucoup de sujets à traiter, mais ménagez-vous ; le piège qui s'est refermé sur Aphelion ne saurait resserrer davantage son étreinte, à moins d'un bouleversement d'envergure, mais je ne crois pas que cela soit d'actualité...

Il marqua une courte pause pour décortiquer ce qu'avait dit le propriétaire de l'Aquilon concernant le baron. Ainsi donc, sa mort était bien réelle, et la population d'Amalsys était véritablement en deuil. C'était à la fois un bien et un mal que de l'apprendre, un mélange doux-amer qu'avala le Sidereus sans rien laisser paraitre. C'était le témoignage de leur échec mais aussi la confirmation qu'aussi puissant que soit Duncan, la manipulation des informations parvenues jusqu'au natif d'Arkady n'était pas encore à prendre en compte. Ce qui ne l'empêcherait pas d'être méfiant et de vouloir vérifier méticuleusement chaque article qui lui serait transmis par ses sources. Les murs ont des oreilles et celles-ci ne trainent jamais loin de bouches pour répéter ce qu'ils entendent, et effectuer quelques vérifications serait certes long et laborieux, mais néanmoins faisable.

Pour me montrer pleinement honnête, d'autres criminels que j'imagine prospérer dans ce chaos me préoccupent plus que ce triste sire, mais passons. Mes excuses pour la violence à laquelle je me suis adonné, mais j'estimais urgent d'en avoir le coeur net pour que nous puissions accoster des dialogues autrement plus cruciaux, tels que ceux-ci. Je te présente également toutes mes excuses pour notre incompétence à protéger sieur Lokharis, à laquelle nous n'avons su pallier... Ce n'est certes pas genèse de pardon, mais sache que nous saurons rattraper cette défaillance en temps voulu.

Déglutissant discrètement, il en profita pour reprendre son souffle. Ce n'était pas son propre que d'être si bavard, mais il faisait encore - heureusement - bien pâle figure face à son visiteur. Il fallait bien ménager sa salive s'il voulait pouvoir maintenir durablement le dialogue, ce qui s'avérait être une épreuve trépidante pour ses cordes vocales. Entendre parler de l'engagement de créatures tels que les Vieumaurs - impliquant donc toutes leurs déclinaisons - rappela à son bon souvenir ceux qu'il avait vaincu en les compagnies respectives de Casey et de Stilgard, guerriers et ours. Se remémorer cela manqua de le faire frissonner avant qu'il ne continue, se jurant de songer à prendre de quoi se désaltérer à portée de main lors de son prochain échange continu avec l'intéressé.

Que voilà d'étranges procédés... Je ne me permettrai toutefois point de le dénigrer, bien évidemment, mais j'avoue être laissé grandement perplexe par l'utilisation d'une telle armée. Tant qu'elle est tenue sous contrôle et attentivement surveillée, je présume que cela ne peut point causer de problèmes, mais je ne puis taire ma crainte que cette loyauté de leur part ne soit qu'illusoire. Aussi, j'ose espérer que vous êtes disposés à les éliminer promptement en cas de dysfonctionnement dans leur utilisation.

Jaugeant sa participation à la remise en forme de Segismundo comme plus qu'acceptacle, il recula la paume pour la passer dans sa chevelure saphirine, repoussant quelques interminables mèches avant de replacer le pan de la bure dans laquelle il était enroulé, déplacée par la fébrilité des gestes effectués dans le feu de l'action. Le froid n'était certes plus aussi efficace qu'auparavant à son encontre, mais cela ne l'empêchait pas de vouloir être correctement couvert en plus de soigner son allure.

Quand aux responsables de l'assassinat du baron... Il s'agit précisément de ceux dont je vous ai fait part précédemment. Le nom du meneur de ce syndicat du crime est Kuran Sôen, il s'agit d'un Zéphyr pourvu d'ailes noires. Je ne vous mentirai pas en vous avouant que j'ai des comptes à régler avec ce sinistre personnage, responsable de ma disgrâce au sein des Terres Brûlées pour m'avoir fait endosser le poids de ses méfaits. Je le pensais seul jusqu'à récemment, mais il s'est manifesté en compagnie d'acolytes lors des faits que vous évoquez, et je dois avouer n'avoir pu anticiper cette compagnie. Je ne serais pas étonné de voir ce groupuscule prendre l'ampleur et devenir une menace tout aussi inquiétante que celle qui pèse sur Solaris et ses habitants...

S'interrompant une fois de plus, il massa brièvement son épaule endolorie par le manque d'ancienneté de ses acérées retrouvailles avec l'individu au centre de son soliloque. Cette gêne ne disparaitrait pas de sitôt, et en avoir fait fi pour en finir plus vite avec son opposant n'arrangeait pas son engourdissement partiel. Sentant sa gorge s'assécher au fur et à mesure de ses interminables propos, ayant l'impression de discutailler depuis des heures dans cette bâtisse laissée à l'abandon, il avala sa salive à défaut d'autre breuvage et s'abstint de tirer la langue pour symboliser sa progressive déshydratation.

Que diriez-vous de m'accompagner jusqu'à notre refuge pour continuer ? Je dois avouer que déverser un tel flot continu de paroles n'est pas dans mes habitudes, et que j'aimerais pouvoir m'hydrater avant que nous n'allions plus loin...

Il faut reconnaître que je parle sans me soucier d'être écouté, il n'a pas tout à fait tors sur ce point. Mais après tout, nous sommes au milieu de nulle part, n'est-ce pas? Trouver des oreilles qui traînent dans le coin me semble bien improbable. Bref. Le point positif, c'est qu'il ma dit ce que je désirais savoir. Le "sinistre personnage", comme il le nomme. L'assassin sans scrupule du Baron. Kuran Sôen. Il me semble avoir déjà entendu parler de lui, quand j'y réfléchis. Je ne sais plus exactement à quelle occasion, mais j'en suis certain. Probablement pas en bien, quand on y réfléchit. Bref. J'ai le nom qu'il me fallait, je n'ai pas l'intention de traîner plus dans ces contrées gelées. Même si, quand il ne vous plante pas un poignard dans le ventre, la compagnie de cet historien – Arsiesys, si mes souvenirs sont bons – est plutôt agréable, des obligations m'appellent. Je dois, sans attendre, aller négocier avec le leader des Per Nebulas. Cela ne m'enchante guère, sachant que durant notre dernière rencontre il semblait avoir gardé quelque grief contre moi, mais en fin de compte, je pense que c'est une bonne occasion de ce réconcilier et de rapprocher nos deux guildes. Cette coopération pourrait être vitale dans le conflit à venir. Même si Per Nebulas n'est pas la guilde la plus influente qui soit, elle nous a bien aidé dans notre première exploration du temple du savoir. Je me remémore un instant la terrifiante hydre bicéphale qu'il nous fallût combattre au sein même du temple. La bête, monstrueuse, avais emportée l'un de nos compagnons. Ce qui nous a permis d'étudier ses notes, d'un point de vue purement cynique, et de développer un peu mieux la technologie du stockage d'énergie et le procédé de vieumaurisation des cadavres. Certes, quelque peu scabreux, mais tellement utile… Bref. Je me ressaisis et, voyant que le vainqueur de notre duel attend une réponse, prend une inspiration – qui me gèle les poumons de l'intérieur – et commence à parler.

-Euh… Je suppose que vous voulez parler de vous désaltérer? Eh bien… C'aurait été avec un grand plaisir, mais je crains que le devoir ne m'appelle en d'autres lieux. Vous l'aurez compris, nous vivons une période en ébullition. Vous devez y être particulièrement sensible; non seulement vous écrivez l'histoire, mais vous la vivez également. Bref. Babel est une guilde qui manque cruellement de dirigeant, bien que nous commencions à y pallier. Le monde tourne très vite, et les armées se lèvent vite aussi. Duncan lancé, je doute qu'il s'arrête en si bon chemin. Le temps nous est compté. Je pars de ce pas conclure une alliance avec la guilde d'explorateur Per Nebulas, qui a brillé notamment par son aide dans l'exploration du temple du savoir. Elle aussi c'est sentie grugée par Duncan, et il ne fait pas de doute qu'elle acceptera notre proposition…

Je laisse le froid rougir mes joues, l'espace d'un instant. Certes, refuser cette proposition peu paraître politiquement peu habile, mais Sam arrive derrière moi pour parler de ceci plus amplement, et je me doute qu'il en sera tout à fait capable. Chacun ses tâches, il serait utopique de vouloir tout contrôler. Me blessures sont à peu près guérie, mais ce n'est nullement el cas de mes vêtements, qui reste plus ou moins en lambeau. Par chacune de ses déchirures, un froid sauvage mord désagréablement ma chair. Et, si je reste assis plus longtemps dans la neige, je suppute que du gel se formera sans attendre dans ma chevelure. Déjà les fines goutes de sueur qui coulaient sur mes tempes se sont figées, et je sens mes extrémités devenir insensibles. Arsiesys a entièrement raison sur ce point: ce n'est pas un endroit où discuter…

-Je me dois donc de décliner votre proposition, mais au regret. Un autre membre influent de Babel viendra sans aucun doute à votre rencontre dans un avenir proche. Je pense à Samuel Corazon, qu'il me semble que vous avez déjà rencontré… Bref. Ce sera un plaisir et un honneur que de me battre à nouveau contre vous un jour, mais actuellement il semble clair qu'il me reste des progrès à faire… Bref. Sur ce, je vous abandonne et souhaite une bonne continuation. N'hésitez pas à passer faire un tour dans les Baronnies, ou nous trouverons un lieu plus propice à une longue discutions.

Sur ces mots, je me lève, lui adresse un sourire, et marche sans me retourner jusqu'à l'Aquilon. Prochaine étape: l'Archipel des cerisiers…

» Je hais le froid.
» Fuir le froid.
» Quelques recherches dans le froid [PV]