Après l'échec... [PV Casey, puis DL]

Il me fallut un certain temps avant d'être complètement remis de mes blessures de mes nombreux combats, en particulier de ceux m'ayant opposés à ce Singam-Vellai se battant avec un chakram et que Arsiesys et moi avions finalement vaincu. Notre retour, à mon ami et moi, se fut sans rencontre particulière, nous évitant ainsi de nous engager dans une lutte qui serait, cette fois, une défaite pour nous. Notre état nous ne permettait pas de combattre à pleine puissance face à n’importe quel ennemi. C’est d’ailleurs cela qui m’avait fait doucement rire en chemin, l’idée de me faire battre par un jeune Skowe, créature étant ridiculement faible… Quoiqu’il en soit, nous sommes tranquillement arrivés à notre auberge et après notre soin, nous partîmes vers de nouvelles aventures…

Plutôt mésaventures en fin de compte…

Des semaines venaient de s’écouler et c’est avec un air déçu que je suis revenu de notre voyage. Je n’avais pas dit un seul mot. J’étais sidéré par notre échec cuisant, subit d’abord à Amalsys puis à Aphelion. Nous n’avions rien pu faire pour protéger Garcia Lokharis et cette ordure de Zéphyr avait réussi à le supprimer. Mais pire que tout, nous n’avions rien pu faire pour empêcher ce Duncan Knox de prendre le contrôle de l’Empire Solaris. Nous avions lamentablement échoué et nos rêves semblaient s’être envolés…

Pourtant, dans le fond, quelque chose me poussait à me dire que je ne pouvais laisser les choses ainsi. Que moi, Casey Rowen, détenait entre mes mains quelque chose qui pouvait me permettre de modifier les évènements, de les rendre meilleur… De faire retrouver à Syren la tranquillité et la paix qu’elle avait tant connu durant ces nombreux siècles. Quelque chose me disait que… c’était cela ma voie. C’était ça que je devais faire : protéger la paix et la liberté dans notre monde. La sauvegarder et l’apporter dans les lieux où elles étaient absentes. Certes, je sais que je n’ai que dix-neuf ans et que je commence à peine à me faire une place dans nos terres mais… Si c’était bien ce que je devais faire, si cela est bien la voie que je dois emprunter alors pourquoi ne pas tenter ? Après tout, ne suis-je pas un Aventurier, un homme qui dispose d’un courage qui n’a guère d’égal ? Si, bien sûr. Quoiqu’il en soit, si je veux faire passer le Divum à l’action, il serait peut-être temps de rompre cet anonymat sur l’identité du Caelestis, le Leader Suprême de notre Guilde : moi. C’est pour cela que j’ai demandé à chaque membre de la Guilde des Cieux de m’attendre dans l’auberge. J’étais resté à l’extérieur, non loin du lieu de rendez-vous. Pourquoi ? Tout bonnement parce que, non loin de là, j’avais cru voir une jeune femme traversant une situation assez dérangeante… Il fallait donc que j’aille voir de plus près ce qui se passait, pour voir si cette personne avait effectivement besoin de mon aide ou non…


+4 EXP

A... Arrêtez ! Laissez-moi ! Aaaaah !

C’est bien ce que je pensai… Cette demoiselle avait bien des soucis. Les quelques pas en avant que je venais de faire m’ont permis d’être suffisamment proche pour entendre l’appel de la jeune femme et être suffisamment éloigné pour que le quidam qui la dérangeait ne me voie. Prenant en main le petit bâton blanc qui me servait d’arme, j’avais actionné le mécanisme permettant ainsi à mon arme de se transformer en un grand trident blanc. L’arme déployée, je me suis mis à courir le plus vite possible, espérant arriver avant que le Singam-Vellai ne fasse du mal à la demoiselle en détresse. Car oui, son agresseur n’était rien d’autre que l’un de ses grand lions blanc bipèdes, disposant d’un corps et d’une force surpassant celle de n’importe quel être humain. D’ailleurs, quelque chose m’inquiétait… De là où j’étais, j’arrivais à voir le Singam s’armer d’un arc et… Commencer à se préparer à tirer deux flèches en direction de la demoiselle !?! Bon sang ! J’avance à un rythme pas assez rapide pour stopper cette attaque… Et si je tente de lancer Calypso, je ne toucherai pas mon adversaire, c’est quasi-certain ! Si seulement je pouvais me déplacer d’un point à un autre, comme une téléportation…

Minute ! J’ai quelque chose qui me permet de faire ça. Certes, c’est une certaine distance mais… Qui ne tente rien n’a rien après tout. Concentrant le mana présent dans l’air autour de moi, j’ai soudainement disparu pour apparaître de nouveau, cette fois quelques mètres plus loin, devant le Singam-Vellai. Dès qu’il me vit, il laissa ses deux projectiles partir dans notre direction mais je n’eus aucun mal à les repousser, grâce à un habile coup de trident. La demoiselle, comprenant qu’elle me gênerait si elle restait derrière moi, chercha un endroit où se protéger mais elle ne trouva pas, sans doute à cause du stress qui était présent en elle. D’une voix rassurante, je lui dis de s’abriter dans la taverne appartenant au Divum Legi, tout en lui montrant du doigt la position exacte de notre bâtiment. Elle me remercia, juste avant de partir en courant des lieux. Bien, maintenant qu’elle était en sécurité, je pouvais m’occuper de ce lion bipède.

Il n’eut aucun échange de mots entre l’ennemi et moi. Non, j’eus juste droit à un regard agressif de sa part. Le mien en revanche était calme, serein. Il n’exprimait aucune animosité envers mon antagoniste bien que je déteste que des personnes de son gabarit s’en prennent à des personnes ne pouvant rien leur faire physiquement. Certes, le « félin » était bien plus imposant que moi quand on observait nos corpulences mais j’étais loin d’être faible ; après tous les combats auquel j’avais participé, j’avais acquis une expérience non négligeable, qui m’avait permis de devenir un bon combattant. Je n’avais plus rien à voir avec le jeune homme débutant que j’étais il y a de cela quatre mois. J’avais changé, tant sur le plan physique que moral et cela, je comptais bien le montrer à mon antagoniste. Visiblement non content que je l’ai empêché de dépouiller la belle demoiselle, le lion blanc tenta de m’attaquer à nouveau, en décochant une flèche. Mais encore une fois, je fus le plus rapide. Me téléportant, je suis apparu dans son dos et, d’un magnifique mouvement, j’ai abattu les pointes de Calypso en plein dans son dos. Une quantité de sang jaillit abondamment tandis que la créature hurlait de douleur.

A peine avais-je retiré mon arme de son corps que le Singam se retourna et me tira une nouvelle salve de flèches. Mais encore une fois, je fus le meilleur : toutes ses flèches furent repoussées par Calypso. J’avais vraiment acquis d’excellents réflexes… Heureusement que j’avais demandé à Arsiesys, sur le chemin du retour, de m’entraîner à améliorer ma défense et mes réflexes. Grâce à sa haute maîtrise du mana et sa cadence de tir tout bonnement formidable, j’avais pu suivre un excellent entraînement, qui avait plus qu’augmenter mes capacités défensives. Et cela se voyait nettement dans ce combat qui tournait largement en ma faveur. Mais je ne dois me laisser emporter par ma réussite sinon, je risque justement d’être trop confiant et de me faire avoir par cet archer. Bien que je sois concentré, cela ne semblait pas le cas de mon adversaire : il n’arrêtait pas de tirer, visant largement à côté de moi les trois quarts du temps. Ceci fut une erreur pour lui. A un moment, j’ai vu une énorme ouverture : j’en ai profité pour frapper à nouveau le Singam-Vellai, ce qui fut un succès. Il avait beau être impressionnant physiquement mais c’était bien là tout ce qu’il avait. Ce type était d’une nullité affligeante.

Et d’ailleurs, ce combat m’ennuie. Il me fatigue. Je ne comptais pas le tuer mais vu la façon dont il continue à me bombarder de flèches alors que je domine très nettement le combat… Non, cette créature souhaite se battre jusqu’à ce que mort s’en suive… Bien, il ne sera largement pas déçu. Reculant alors qu’il continuait à m’envoyer des flèches, j’ai bien serré Calypso dans ma main droite avant d’envoyer brutalement l’arme vers mon ennemi. Les bouts pointus de l’arme transpercèrent le torse de mon ennemi mais pas suffisamment pour l’envoyer six pieds sous terre, à ma plus grande déception. Mais fort heureusement, une idée me vint rapidement en tête. Courant à toute vitesse, je fis un bond avant de faire s’écraser la plante de mes pieds sur le bout contondant de mon arme. Et là, tout se passa comme je l’avais imaginé : la puissance du choc avait enfoncé plus profondément l’arme dans le corps de l’adversaire, libérant une vague de sang avant que le Singam ne pousse un ultime cri de souffrance et ne s’effondre au sol, le corps inanimé. Je venais de le vaincre d’une manière un peu étrange si on connaît un minimum mon style de combat. Après avoir retiré Calypso de la dépouille de mon ennemi, j’eus comme unique réaction celle de libérer ces quelques mots, expliquant parfaitement ce que je comptais faire à présent.

Les autres doivent être en train de m’attendre… Si je continue à traîner dehors, ils ne vont pas être de bonne humeur… Je ferai mieux de retourner à l’auberge.

C’est ainsi, tout en transformant de nouveau mon arme en petit bâton, que je suis retourné dans le bâtiment servant de quartier général au Divum Legi, afin de m’entretenir avec mes partenaires pour décider de ce que nous comptions faire afin de changer notre monde…

Depuis les récents événements qui avaient fait tomber Aphélion aux mains des Eclipsis et de leur abominable manipulateur de meneur, Arsiesys s'était assombri. À la fois de n'avoir pu mettre le Zéphyr aux ailes d'encre auquel il devait ses démêlés avec la justice d'Arkady en échec, voir de le mettre à mort, ni même d'avoir été là pour contrer les plans de celui qui se revendiquait actuellement comme dictateur à vie de l'empire. Pour couronner cette succession de défaites, s'être indirectement rangés aux côtés des Zéphyrs et Argonates en voulant faire bouclier pour permettre à leur chef d'atteindre son père les plaçait en ennemis des terres brûlées, que cela corresponde à leurs souhaits ou non. La situation de l'historien étant déjà plus que précaire vis-à-vis de ses terres natales en raison des problèmes ayant semé les graines de la discorde de ce conflit de grande envergure, on pouvait facilement imaginer que cette trahison ne resterait pas impunie. Et enfin, Veith était désormais porté disparu, et ce depuis qu'une bonne portion de Solaris s'était volatilisée dans une prise de pouvoir cataclysmique. Duncan Knox avait su voir les choses en grand, au grand détriment du tout-Syren. Particulièrement de la flotte d'Arkady qui avait subi de lourdes pertes durant cette querelle sans merci qui avait tourné à leur plus grand désavantage dès lors que le tyran s'était placé sur le devant de la scène pour passer un coup de balai.

La situation pouvait difficilement être moins abordable, et l'homme de lettres avait de quoi redouter que le Divum Legi n'en vienne à tomber en disgrâce dans les jours à venir. Leur impuissance était intolérable. Quand à savoir si le monde en tiendrait compte... Ce n'était pas encore sûr, mais nul doute que les rumeurs feraient toujours partie intégrante de la circulation des informations. Et ce coup-ci, cela ne tournerait pas en leur faveur, bien au contraire. Hautement contrarié par ces événements, le mage s'efforçait néanmoins de s'astreindre à un calme olympien, plongé à la fois dans ses livres et dans un mutisme presque permanent depuis qu'ils avaient regagné l'auberge où ils vivaient, vaincus et déconfits. Les jeux étaient faits, et nul n'avait gagné la partie... Seuls les déficits s'affichaient pour tout un chacun. Tous n'avaient été que les pions sur un damier à l'échelle mondiale. On ne pouvait pas leur en vouloir, mais cela restait aberrant, et la pilule ne passerait pas immédiatement. Enterrer ces faits et faire le deuil d'un ami disparu demanderait une volonté de fer qu'ils ne pouvaient avoir pour l'heure, se remettant durement de ce qu'ils avaient subi eux aussi durant la mise en place des engrenages de ce gigantesque complot. L'heure était grave. Agir était primordial. Savoir comment était plus délicat... Une conviction fixe habitait néanmoins l'esprit de l'archiviste : il n'en avait pas fini avec Kuran.

C'était un pourcentage de certitude assez faible dans l'ensemble de cette confusion, mais cela demeurait une prise à laquelle se raccrocher pour ne pas sombrer, et la flamme de sa vigueur ne pouvait qu'en être ravivée. Leurs idéaux en avaient pris un coup... Tournant distraitement les pages de la fiction d'aventure qu'il lisait depuis quelques temps, une épopée s'étalant sur plusieurs volumes à en faire pâlir les lecteurs les plus assidus, Arsiesys finit par reposer l'épais tome relié après l'avoir clos. Inutile. Sa concentration n'était plus. Et la faire renaître de ses cendres serait un exercice à réserver pour plus tard, étant donné le nombre époustouflant de soucis tourbillonnant dans un cyclone migraineux au fin fond de son crâne. Un mélange à rendre fou le plus sain des hommes. Dans un interminable soupir, il porta à ses lèvres la tasse de thé fumante qu'il s'était préparée pour l'occasion, en espérant que cela apaise ses maux – psychiques, la fièvre s'étant effacée depuis. C'était heureux : les encombrements étaient assez nombreux sans en rajouter. Reposant le récipient, il se mit à parcourir distraitement de l'index le cercle de son bord, contemplant les cercles concentriques s'éloignant du milieu du breuvage ambré. Assis en bout de table de celle disposée au centre de la grande salle, Arsiesys se laissa aller contre le dossier de son siège. Se concerter. C'est ensemble qu'ils construiraient une solution depuis cet effondrement. Prendre les débris pour mieux rebâtir, faire table rase des échecs et des humiliations pour se relever sur un sol sans aspérité qui nous fera trébucher tant que nous ne nous serons pas remis en mouvement... Était-ce seulement possible ? Là était la question.

On pouvait dire que l'humeur n'était pas à la fête! Depuis les déboires que nous avions subi dans les Baronnies, suivis de l'épisode apocalyptique de la capitale, qui avait ruiné une partie de la ville, et donc mis à néant la plupart de mes sources de revenus, on pouvait dire que tout le monde l'avait mauvaise. Et la disparition du chasseur de prime coincé du trou de balle n'aidait pas non plus, laissant à sa place un sentiment d'insécurité qui s'était propagé dans notre bande, qui avait eu le malheur de se croire indestructible, avant ces événements. Quant à moi, et bien, comment vous sentiriez vous si on vous avait détruit la plupart des coins où vous alliez voler, et mis le pays sous dictat, chose qui n'arrangeait pas les affaires, puisque toutes les richesses devenaient centralisées, et qu'en plus vous aviez été mis sur la touche par une espèce de Cow Boy baltringue un peu trop porté sur les vêtements flashy et la poudre? Ouais, je l'avais mauvaise, et heureusement que j'avais toujours une porte de sortie, prévue en cas de coup dur, afin d'éviter d'être sur la paille. J'avais béni quelques temps ma prévoyance et ma débrouillardise, malgré le fait que je devais maintenant orienter mes affaires vers d'autres axes, puisque certaines portes s'étaient refermées avec la puissance d'une massue écrasant une tête.

Jouant avec ma dague, assis dans un des confortables fauteuils de l'auberge que j'avais restaurée à mes frais, j'avais longuement réfléchi sur le sens de tout ça. Étais je fait pour cette prise de parti, après tout? La philanthropie n'était pas mon fort, et je pouvais constater de visu les conséquences d'une telle entreprise. Alors continuer en ce sens...mais non. Je devais le faire, pour Casey, pour l'autre tête de cactus qui comptait sur moi pour faire la cible pendant qu'il explosait la plupart de nos opposants, et puis tout simplement parce que participer à ce projet me rachetait en quelque sorte, me permettait d'enfin penser à une possible entente avec le reste de l'humanité. Et puis, être un héros ne signifiait pas pour autant que je devais laisser mes activités annexes de côté, les légendes étaient aussi faites de bandits qui avaient agi pour la bonne cause...oui, c'est cela, j'avais la possibilité de devenir un Prince des Voleurs. Ça sonnait bien, c'était classe, clinquant, j'aimais assez. Fallait bien trouver une note d'espoir au milieu de tout ça, hein? D'ailleurs, Casey étant revenu de sa petite balade, j'étais sûr que nous allions reparler affaire. Il me suffisais de lui refiler un peu de mon espoir...